Colloque international – Monuments, (dé)monumentalisation : approches sémiotiques

22 et 23 novembre 2018
Bordeaux

sous les auspices de l’Association internationale de sémiotique visuelle (AISV) et soutenu par la région Nouvelle Aquitaine, l’université Bordeaux-Montaigne et le laboratoire MICA.

 

Programme

Le programme complet est disponible ici 

Argumentaire

Le colloque international Monuments, (dé)monumentalisation : approches sémiotiques a pour objectif de comprendre comment les événements structurant la mémoire individuelle, collective ou historique (Halbwachs 1994) trouvent un plan de manifestation dans des objets qui vont, à leur tour, structurer l’espace en l’informant d’une signification particulière.

Les signes et les objets nous sont indispensables pour partager nos expériences et conserver le souvenir (Locke 1972 [1689]). La transmission et la conservation d’un événement imposent de mettre en place des procédures d’ordre symbolique qui consistent à convertir et transcrire les données de la réalité événementielle dans une structure d’accueil qualifiée de monument ou de mémorial. Ainsi investie, elle est alors une « oeuvre créée de la main de l’homme et édifiée dans le but précis de conserver toujours présent et vivant dans la conscience des générations futures le souvenir de telle action ou telle destinée » (Riegl 1984). La signification du monument se conçoit relativement à l’espace auquel il donne sens en retour. Le monument fonde un site dépositaire d’une valeur, un lieu déterminé par l’ordre de coexistence des objets qui le composent et, plus exactement un topoï, configuration stéréotypée dans laquelle des sujets exécutent un faire ritualisé (s’incliner, déambuler, lire, déposer une fleur…). Le monument peut être considéré comme un acte de langage qui, à la différence de la sculpture traversée par une intentionnalité essentiellement esthétique, réactive et présentifie le souvenir dont il est dépositaire. Son efficace tient au croire dont il est investi, qui lui permet de restaurer des représentations, des images-souvenirs (Halbwachs 1994), et de ranimer les affects et les passions dont elles sont lestées. Le monument fait savoir, fait croire et fait faire en déployant une factitivité (Greimas 1983 ; Deni 2001 ; Beyaert-Geslin 2015) ritualisée. Il ébranle ainsi « par l’émotion, une mémoire vivante » déléguée à l’expérience du lieu (Choay 1996).

Les études sémiotiques du monument se sont attachées à des catégories bien précises : les musées mémoriaux (Violi 2012), les monuments de la Première guerre mondiale ou ceux de la Shoah, par exemple. Elles ont révélé que la manière de se connecter au passé via la lecture du monument répond à deux grandes voies stratégiques. La première opte pour la représentation du drame en mobilisant une iconographie stéréotypée – c’est la voie figurative – et la seconde prend le parti de faire éprouver les affects associés à l’événement – c’est la voie métaphorique. Notre projet est de confronter les différentes façons de « dire » le drame, de différentier actes de langage et rituels pour construire un cadre d’expertise général dans lequel des monuments jamais étudiés pourront être intégrés : les monuments du terrorisme, ces autels éphémères élaborés à partir d’apports individuels, les formes mémorielles « détournées », manifestation d’un bricolage sémantique levi-straussien (monument à la mémoire de la Princesse Diana à Paris) mais aussi les monuments « positifs » consacrés aux victoires militaires et aux personnalités prééminentes, etc.

Quelles sont les symbolisations, les formes expressives qui sont données comme équivalentes des contenus mémoriaux ? Quand ou pour quel motif érige-t-on un monument ? Où se place-t-il dans la ville ? Dans quelle mesure cette inscription urbaine détermine-t-elleson ef cace ? En quoi cette mise en récit de la mémoire donne-t-elle sens à la ville ? Toutes ces questions portent l’attention sur les controverses liées à l’objet de la commémoration, à la localisation du monument et aux processus de valorisation ou de dévalorisation mémoriels qui aboutissent à la monumentalisation ou à la démonumentalisation. La tension monumentalisation/démonumentalisation, qui permet de relier les recherches sur la mémoire traumatique aux cadres conceptuels de la sémiotique de la ville et de la sémiotique des cultures, concentrera toute notre attention.

Informations pratiques

Centre de culture scientifique Cap Sciences
Hangar 20 • Quai de Bacalan
33300 Bordeaux

Pour plus d’informations, voir le site du colloque.